C’est là, perchés sur des rochers à plus de 3 000 mètres d’altitude, que l’on observe le soleil se coucher à l’horizon. Grandiose, il se glisse derrière les montagnes et, le temps d’un instant, réchauffe nos corps engourdis par le froid qui nous saisit depuis le début de l’enregistrement.
Suite à un pique-nique d’anniversaire improvisé par notre hôte, qui fête ses 40 ans ce jour, nous savourons l’instant présent, quand soudain, Victor nous extirpe de nos rêveries : « Les ami·es, maintenant que le soleil est tombé, il nous reste une petite vingtaine de minutes pour redescendre vers la station avant la tombée de la nuit. »
Nous voilà à rechausser nos skis de randonnée à la hâte. En tête, Victor sillonne aisément ce flanc de montagne situé aux alentours de la station de Val Thorens. Nous lui emboîtons le pas, ici, dans ce qu’il aime appeler « son jardin », tellement il en connaît le moindre relief.
« Dans quelques instants, on va entrer dans le champ de tir, donc ça ne sera pas le moment de traîner », nous a-t-il lancé un peu plus tôt, comme pour mettre en exergue le sujet qui nous rassemble aujourd’hui.
Victor Galuchot est un skieur professionnel. Freerider, vidéaste, coach et papa, il côtoie ces hauteurs quotidiennement, en quête de la neige idéale et de la trace parfaite pour ses projets sportifs. Sensible, réservé et humble, il n’a rien de l’idée qu’on pourrait se faire d’une « tête brûlée », qui braverait les éléments fleur au fusil. Au contraire, son approche de la montagne se résume à cette phrase qu’il a tellement répété dans la journée qu’elle est désormais gravée dans nos mémoires :
« Pour moi, quand y a un doute, c’est qu’y a pas de doute »
Victor Galuchot
Pourtant, malgré cette vigilance, son quotidien est rythmé par la présence de la mort, qui s’invite régulièrement. Séracs, crevasses, avalanches : les risques en montagne sont partout, même pour celles et ceux qui en minimisent les dangers. Et quand la mort frappe et décime des ami·es, des compagnons de cordée ou des connaissances, leurs ombres hantent bien souvent les sommets.
Vous l’aurez compris, dans cet épisode de Vent Debout, nous abordons un sujet relativement tabou dans la société, mais qui a une certaine prégnance en montagne. Il s’agit de la question de la mort et de la prise de risque associée aux disciplines de montagne.
« Personnellement, j’ai des amis qui sont morts en montagne, j’ai aussi sorti des gens d’avalanches qui étaient morts… Je pense que t’es dans un milieu où ce n’est pas difficile de mourir »
Victor Galuchot
Pour comprendre ce sujet complexe et difficile, et tenter de trouver des solutions pour réduire l’accidentalité en montagne, nous avons également interrogé Juliette Craplet, doctorante en sociologie, qui a étudié l’évolution du rapport au risque chez les alpinistes de la vallée de Chamonix au fil des âges et des générations.
« Ça peut paraître sinistre d’étudier un tel sujet, mais c’est l’une des choses qui m’a le plus marqué quand je suis venue m’installer à Chamonix, il y a quinze ans. C’est la présence de la mort et des accidents en montagne. J’ai vu plus de morts durant ma première année de vie ici qu’au cours de toute ma vie d’avant »
Juliette Craplet
De retour en station, la nuit est tombée. Il ne nous reste plus qu’à ranger nos DVA (détecteurs de victimes d’avalanches), crampons, piolets, skis et bâtons et à profiter de cette belle soirée jusqu’à la prochaine sortie.
Cet épisode est possible grâce au soutien de la fondation Petzl, merci.
D’ici là, on vous souhaite une bonne écoute.
Empreinte carbone
Train
Paris <> Moutiers | 1290km | 3,78 kg CO2e
Marseille <> Moutiers | 760km | 2,23kg CO2e
Total
6,01kg CO2e
(source : Ademe)
Sources et références
Le film de Victor Galuchot, Les Étoiles de la terre (2023)
La conférence de Juliette Craplet, La mort en montagne, une approche sociologique.
L’article de Xavier Cailhol (Alpine Mag), Peut-on parler d’alpinisme autrement qu’à travers des exploits ?
Le festival de films, Femmes en montagne, dont l’édition 2025 se déroule du 13 au 16 novembre à Annecy
L’épisode de Vent Debout avec l’alpiniste Yann Borgnet, Plus vite, plus haut, plus fort.
Le bilan 2024 du SNOSM (Système National d’Observation de la Sécurité en Montagne).
Le travail de la Fondation Petzel.
Extraits audio :
- A venir